Manifestation à Paris contre Boko Haram: ma contribution au débat
5 mars 2015Une grande manifestation contre le terrorisme de Boko Haram vient d’avoir lieu à Yaoundé. Devant la gravité des crimes commis par cette organisation obscurantiste, l’unité nationale est indéniablement nécessaire. J’ai été des premiers intellectuels de la diaspora camerounaise à soutenir les Forces Armées Camerounaises en lutte contre Boko Haram. On ne peut donc que saluer la volonté de tous, du pouvoir comme de l’opposition camerounais, à vaincre le terrorisme religieux dans un chorus national rare et inespéré.
Cela étant dit, je ne fais pas partie des euphoriques, voire des hystériques de la marche de Yaoundé. Pour au moins trois ans raisons:
1° Le pouvoir Biya a constamment violé les droits de manifestations pacifiques de la société civile et de l’opposition politique camerounaises depuis des décennies. Il est temps qu’on manifeste au Cameroun, pour ou contre le régime, avec la protection des forces de police et de gendarmerie, sans répression ni violence aucune!
2° La marche de Yaoundé a fait l’objet de récupérations politiciennes grossières de la part des élites du pouvoir, qui se sont offert là le bain de foule populaire inespéré qu’elles ne rêvaient plus de connaître, tellement la population les sait corrompues. Il n’est pas question que la lutte nécessaire contre Boko Haram tourne au plébiscite du régime du RDPC.
3° Le régime du Président Biya n’a pas encore accepté de jouer pleinement le jeu de la compétition démocratique moderne (élections libres, transparentes et inclusives; double nationalité pour les millions de camerounais de l’Etranger; respect des droits juridiques élémentaires des citoyens; prise en charge réelle de la misère économique, sanitaire et culturelle de l’écrasante majorité de notre peuple.
J’en conclus donc ceci: oui à l’union des Camerounais contre Boko Haram, mais vivement, que cette Union se consolide réellement autour des valeurs effectives de Vérité et de Justice, que le régime Camerounais actuel n’a que trop rarement respecté dans sa triste histoire. Que la démocratie permette enfin aux Camerounais de passer de l’Unité à l’Union. La première peut se contenter des façades et pancartes hypocrites de circonstance. La seconde appelle l’adhésion des coeurs aux principes justes, fraternels et solidaires qui fondent toutes les cités bienveillantes et prospères.
Par Franklin Nyamsi